
Dans le paysage juridique contemporain, la médiation s’est imposée comme une alternative amiable efficace et de plus en plus prisée face aux procédures judiciaires traditionnelles.
Cette méthode de résolution des conflits, fondée sur le dialogue et la recherche de solutions mutuellement acceptables, se décline principalement en deux formes : la médiation judiciaire et la médiation conventionnelle.
Bien que partageant des principes fondamentaux communs, ces deux types de médiation présentent des différences significatives en termes de cadre légal, de procédure, et d’implications pour les parties impliquées. Cet article se propose d’explorer en profondeur ces différences, offrant ainsi une compréhension claire et détaillée de ces deux approches de la médiation.
I. Définitions et cadres légaux
A. La médiation judiciaire
La médiation judiciaire est une procédure qui s’inscrit dans le cadre d’une instance judiciaire déjà en cours.
La médiation judiciaire est donc initiée par le juge qui, avec l’accord des parties, désigne un médiateur pour les aider à trouver une solution à leur litige. Ce type de médiation est encadré par des dispositions légales spécifiques, notamment en France par les articles 131-1 à 131-15 du Code de procédure civile.
Le juge reste saisi de l’affaire pendant toute la durée de la médiation et peut y mettre fin à tout moment, soit à la demande d’une partie, soit à l’initiative du médiateur, soit d’office s’il estime que le bon déroulement de la médiation est compromis.
B. La médiation conventionnelle
La médiation conventionnelle, aussi appelée médiation extra-judiciaire ou médiation autonome, est une procédure qui se déroule en dehors de toute instance judiciaire.
Elle résulte d’un accord volontaire entre les parties qui décident de recourir à un médiateur pour résoudre leur différend. Cette forme de médiation est régie par des principes généraux du droit des contrats et, dans certains pays, par des lois spécifiques encadrant la pratique de la médiation.
En France, la médiation conventionnelle est encadrée par les articles 1528 à 1535 du Code de procédure civile, issus du décret n°2012-66 du 20 janvier 2012 relatif à la résolution amiable des différends.
II. Initiation et déroulement de la procédure
A. La médiation judiciaire
Initiation de la médiation
Dans le cas de la médiation judiciaire, c’est le juge qui propose aux parties de recourir à la médiation. Cette proposition peut intervenir à tout moment de la procédure, y compris en référé. Les parties sont libres d’accepter ou de refuser cette proposition. Si elles acceptent, le juge désigne un médiateur et fixe la durée initiale de la médiation, qui ne peut excéder trois mois, renouvelable une fois pour la même durée à la demande du médiateur.
Déroulement
Une fois le médiateur désigné, celui-ci convoque les parties à une première réunion d’information. Durant cette réunion, le médiateur explique le processus de médiation, son rôle, et les règles qui seront suivies. Les séances de médiation se déroulent ensuite selon un calendrier convenu entre le médiateur et les parties. Le juge reste informé du déroulement de la médiation et peut y mettre fin à tout moment.
Issue de la médiation
À l’issue de la médiation judiciaire, plusieurs scénarios sont possibles :
• Si un accord est trouvé, les parties peuvent demander au juge de l’homologuer, lui conférant ainsi force exécutoire.
• En l’absence d’accord, l’instance judiciaire reprend son cours.
B. La médiation conventionnelle
Initiation de la médiation
La médiation conventionnelle est initiée par les parties elles-mêmes, en dehors de toute procédure judiciaire, ou même à tout moment d’une procédure en cours. Les parties choisissent librement leur médiateur et définissent ensemble les modalités de la médiation. D’ailleurs, dans la plupart des contrats, il existe maintenant une clause prévoyant le recours à la médiation en cas de litige.
Déroulement
Le déroulement de la médiation conventionnelle est plus souple que celui de la médiation judiciaire. Les parties et le médiateur définissent ensemble les règles de la médiation, le nombre et la fréquence des séances, ainsi que la durée totale du processus. Le médiateur n’a pas de compte à rendre à un juge et dispose d’une plus grande liberté dans la conduite de la médiation.
Issue de la médiation
À l’issue de la médiation conventionnelle :
-
- Si un accord est trouvé, il prend généralement la forme d’un contrat (écrit ou oral) entre les parties. Les parties peuvent, si elles le souhaitent, faire homologuer cet accord par un juge pour lui donner force exécutoire.
- En l’absence d’accord, les parties restent libres d’engager une procédure judiciaire ou de poursuivre la recherche d’une solution amiable par d’autres moyens.
III. Rôle et statut du médiateur

A. La médiation judiciaire
Dans le cadre de la médiation judiciaire, le médiateur est désigné par le juge. Il doit posséder les qualifications requises par la loi, notamment en termes de formation à la médiation. Une liste des médiateurs agréés par les Cours d’Appel, et assermentés figure sur le site web de chaque Cour d’Appel. Le médiateur judiciaire est tenu de respecter certaines obligations légales, comme l’obligation d’informer le juge de toute difficulté dans l’exécution de sa mission.
Le médiateur judiciaire bénéficie d’un statut particulier. Il est considéré comme un auxiliaire de justice et est soumis à des règles déontologiques strictes. Il doit notamment respecter le principe de confidentialité, et ne peut être appelé à témoigner sur les déclarations recueillies au cours de la médiation.
B. La médiation conventionnelle
Dans la médiation conventionnelle, le médiateur est choisi librement par les parties. Bien qu’il soit généralement recommandé de faire appel à un médiateur formé et expérimenté, il n’existe pas d’obligation légale en ce sens.
Le médiateur conventionnel n’a pas le statut d’auxiliaire de justice. Cependant, il est soumis à des obligations contractuelles envers les parties et doit respecter les principes éthiques de la médiation, notamment l’impartialité, la neutralité et la confidentialité.
IV. Confidentialité et secret professionnel

A. La médiation judiciaire
Dans la médiation judiciaire, la confidentialité est garantie par la loi. L’article 131-14 du Code de procédure civile français stipule que « les constatations du médiateur et les déclarations qu’il recueille ne peuvent être ni produites ni invoquées dans la suite de la procédure sans l’accord des parties, ni en tout état de cause dans le cadre d’une autre instance ».
Le médiateur judiciaire est tenu à la confidentialité et ne peut divulguer aucune information recueillie au cours de la médiation, sauf accord explicite des parties.
B. La médiation conventionnelle
Dans la médiation conventionnelle, la confidentialité est généralement assurée par un accord de confidentialité signé par les parties et le médiateur au début du processus. Cet accord peut prévoir des sanctions en cas de violation de la confidentialité.
Bien que le médiateur conventionnel ne soit pas soumis au secret professionnel au sens légal du terme, il est tenu à une obligation de confidentialité contractuelle. Cette obligation peut être renforcée si le médiateur est membre d’une association professionnelle imposant des règles déontologiques strictes.
V. Coûts et financement
A. La médiation judiciaire
Dans le cadre de la médiation judiciaire, les coûts sont généralement partagés entre les parties, sauf décision contraire du juge. Le juge fixe le montant de la provision à valoir sur la rémunération du médiateur et désigne la ou les parties qui devront la consigner.
En France, il est possible de bénéficier de l’aide juridictionnelle pour la médiation judiciaire, ce qui peut réduire considérablement les coûts pour les parties aux ressources limitées.
B. La médiation conventionnelle
Dans la médiation conventionnelle, les coûts sont entièrement à la charge des parties. Elles conviennent librement avec le médiateur de sa rémunération et de la répartition des frais.
Il n’existe généralement pas d’aide financière publique pour ce type de médiation, bien que certaines assurances de protection juridique puissent couvrir ces frais.
VI. Durée et flexibilité

A. La médiation judiciaire
La durée de la médiation judiciaire est encadrée par la loi. En France, elle ne peut excéder trois mois, renouvelable une fois pour la même durée. Cette limitation vise à éviter que la médiation ne retarde excessivement la procédure judiciaire.
La flexibilité de la médiation judiciaire est relativement limitée, car elle doit s’inscrire dans le cadre procédural fixé par le juge. Le médiateur doit rendre compte régulièrement au juge de l’avancement de la médiation.
B. La médiation conventionnelle
La médiation conventionnelle offre une plus grande flexibilité en termes de durée. Les parties et le médiateur peuvent convenir librement de la durée du processus, qui peut s’étendre sur plusieurs mois si nécessaire.
Cette forme de médiation permet également une plus grande souplesse dans l’organisation des séances et dans l’approche adoptée pour résoudre le conflit. Le médiateur peut adapter le processus aux besoins spécifiques des parties sans contrainte procédurale.
VII. Force exécutoire de l'accord
A. La médiation judiciaire
Dans le cadre de la médiation judiciaire, l’accord conclu entre les parties peut être facilement homologué par le juge, lui conférant ainsi force exécutoire.
Cette homologation permet d’assurer l’exécution de l’accord comme s’il s’agissait d’un jugement.
B. La médiation conventionnelle
Pour un accord issu d’une médiation conventionnelle, l’homologation de l’accord est rarement nécessaire.
Cependant, si les parties souhaitent obtenir la force exécutoire de l’accord, cela nécessite une démarche supplémentaire. Les parties doivent demander l’homologation de leur accord par un juge.
Cette procédure, bien que généralement simple, implique une intervention judiciaire qui n’était pas nécessaire jusque-là.
VIII. Impact sur la procédure judiciaire
A. La médiation judiciaire
La médiation judiciaire suspend le cours de l’instance, mais n’y met pas fin.
Si les parties trouvent un accord, cela clôt l’instance judiciaire définitivement. Puisque ‘un accord a été trouvé entre les parties, les procès et tous les recours n’ont plus lieu d’être, et ne peuvent pas recommencer sur le même motif.
Si la médiation échoue, la procédure judiciaire reprend là où elle s’était arrêtée. Cela peut permettre de gagner du temps si la médiation ne conduit pas à un accord.
B. La médiation conventionnelle
La médiation conventionnelle n’a pas d’impact direct sur une éventuelle procédure judiciaire, puisqu’elle se déroule en dehors de tout cadre judiciaire.
Si un accord est trouvé, cela met fin au litige et il n’y aura pas de poursuite judiciaire.
Cependant, si une procédure judiciaire est engagée après l’échec d’une médiation conventionnelle, le juge pourra en tenir compte dans l’appréciation du litige, puisque les parties auront essayé de trouver un accord amiable.

Pour conclure
La médiation judiciaire et la médiation conventionnelle, bien que partageant l’objectif commun de résolution amiable des conflits, présentent des différences significatives en termes de cadre légal, de procédure, et d’implications pour les parties.
La médiation judiciaire offre un cadre plus formel et structuré, intégré au processus judiciaire, avec une supervision du juge et des délais encadrés. Elle peut être particulièrement adaptée aux situations où une procédure judiciaire est déjà en cours et où les parties souhaitent explorer une solution amiable sans pour autant abandonner complètement la voie judiciaire.
La médiation conventionnelle, quant à elle, offre une plus grande flexibilité et une réelle autonomie aux parties. Elle permet une approche sur mesure de la résolution du conflit, sans les contraintes procédurales de la médiation judiciaire. Cette forme de médiation peut être particulièrement appropriée pour les parties qui souhaitent maintenir le contrôle total sur le processus de résolution de leur différend et éviter toute intervention judiciaire.
Le choix entre ces deux formes de médiation dépendra donc de nombreux facteurs, notamment de la nature du conflit, de l’état des relations entre les parties, de l’existence ou non d’une procédure judiciaire en cours, et des préférences des parties en termes de formalisme et de flexibilité.
Quelle que soit la forme choisie, la médiation représente une approche constructive de la résolution des conflits, favorisant le dialogue, la compréhension mutuelle et la recherche de solutions créatives. Elle offre aux parties l’opportunité de résoudre leurs différends de manière plus rapide, moins coûteuse et souvent plus satisfaisante qu’une procédure judiciaire classique.
En fin de compte, la coexistence de ces deux formes de médiation enrichit l’éventail des options disponibles pour la résolution des conflits, permettant une approche plus nuancée et adaptée à la diversité des situations conflictuelles rencontrées dans notre société moderne.
Questions / Réponses
1. Quelle est la principale différence entre la médiation judiciaire et la médiation conventionnelle ?
La principale différence réside dans le cadre dans lequel elles interviennent.
La médiation judiciaire est ordonnée par un juge dans le cadre d’une procédure judiciaire en cours, tandis que la médiation conventionnelle (ou extrajudiciaire) est initiée par les parties elles-mêmes, en dehors de toute procédure judiciaire.
2. Qui initie chaque type de médiation ?
Pour la médiation judiciaire, c’est le juge qui demande la médiation avec l’accord préalable des parties.
En revanche, la médiation conventionnelle est à l’initiative des parties (ou de leurs conseils).
3. Comment sont organisées ces deux types de médiation ?
La médiation judiciaire est encadrée par une décision de justice, tandis que la médiation conventionnelle est organisée par une convention entre les parties, indépendante de toute procédure judiciaire.
4. Y a-t-il une différence dans le déroulement de ces deux types de médiation ?
Le déroulement de la médiation judiciaire et conventionnelle est généralement similaire. La principale différence réside dans les conditions de mise en œuvre du processus de médiation.
5. Quel est l'impact de chaque type de médiation sur une éventuelle procédure judiciaire ?
En médiation judiciaire, c’est la demande de médiation qui interrompt la procédure judiciaire. Si la médiation échoue, la procédure judiciaire reprend son cours.
Pour la médiation conventionnelle, si elle réussit, il n’y aura pas de procès. Si elle échoue, les parties peuvent toujours décider d’entamer une procédure judiciaire par la suite.
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